On a rarement l’occasion de se rendre sur l’Aventin.
La plus méridionale des sept collines de Rome est bien souvent oubliée tant on accorde plutôt sa priorité au gigantisme qui l’entoure : les murs immenses des complexes palatins (du mont… Palatin !), la longue piste ovale du Circus Maximus, les aménagements grandioses des Thermes de Caracalla. Aux pieds de la colline, le Tibre serpente et tout concourt à lui tourner le dos pour une promenade détendue dans le mignonnet quartier du Trastevere, qui vole la vedette au mystérieux et étonnant Testaccio, aux tessons et fabriques oubliés.
L’Aventin, c’est pourtant une colline qui a marqué tes études latines. Elle résonne de la plèbe de Ménénius Agrippa et des Gracques. Elle se couvre ensuite de ces villas au luxe discret de l’Italie raffinée. On grimpe les petites rues, on gravit la colline, et en parcourant la crête qui court d’un sommet à l’autre, on devine derrière des jardins encadrés de cyprès et de palmiers, des villas du XVIIIème siècle aux murs orangés. Et l’on peut y dormir dans des lits somptueux si l’on s’y prend bien… Les églises se mêlent aux palais, Santa Sabina toute de majesté médiévale (par le bout de la lorgnette ICI), San Clemente et son clocher néo-roman, San Alessio et sa légende du pauvre à l’escalier. On n’est jamais à court dans la Ville aux 900 églises.
Il s’y trouve aussi un célèbre jardin où, accoudé au parapet, tu admireras Rome toute entière. Sa partie occidentale tout du moins, les quartiers à l’est du Panthéon étant cachés par les orangers. Tu continues ta promenade, au calme, car pas un bruit sur l’Aventin. Et tu arrives à la petite place des Chevaliers de Malte : au fronton de la porte d’une villa où siège encore le Grand Prieuré de l’Ordre militaire et souverain de Malte, on croit deviner une croix blanche, grecque, centrale, encadrée de croix maltaises à huit pointes, des boucliers et des navires, un heaume et son panache. L’ordre chevalier étale ici sa splendeur, son rôle et sa permanence.
Les mains des visiteurs ont poli le pourtour de la serrure. Fameux parmi d’autres curiosités que réserve la ville, voici il Buco di Roma. On s’approche, curieux, on pose aussi sa main et l’on ajuste le regard que l’on coule dans la serrure…
Une allée aux cyprès bien alignés.
Et au fond, dans la lumière éclatante de l’hiver romain…
… le dôme.
Bramante, Sangallo, Michel-Ange.
Et depuis la colline de l’Aventin surgit la basilique Saint-Pierre de Rome…
Oh, joli !
@Nekkonezumi : quand j'y suis allée, j'avais un peu peur que ce soit le "truc à touristes" (qui te fait traverser la ville pour une attraction qui n'a en fait aucun intérêt) et là, oui la surprise fonctionne vraiment ! 🙂
Wow... Ca donne envie d'aller voir... Merci 🙂
@Tigreek : c'est fou comme une ville peut réserver de surprises. Rome... je ne m'en lasse pas, c'est une redécouverte à chaque fois !
Patrick Modiano décrit ce trou de serrure d'où l'on aperçoit le dôme de Saint-Pierre, dans Livret de famille, recueil de nouvelles plus ou moins autobiographiques (Gallimard, 1977, et réédité en collection Folio, page 149). Le personnage qui, dans ce passage du livre, invite en 1963 l'auteur-narrateur à coller son œil contre la serrure de la villa n'est autre que le roi déchu d'Égypte, Farouk.
Bien à vous.
P.s. : « Rome tout entière » (sans e).
Il peut exister des exceptions, par exemple dans "Vie des Martyrs" de Georges Duhamel (1884 - 1966).
" Mais cette souffrance-là veut être soufferte toute entière ; elle n’étourdit même pas ceux qu’elle accable. "