On m’a parfois demandé pourquoi je voyageais autant.
Etrangement, cette question ne sonne jamais neutre à mes oreilles. C’est même une remarque voire un reproche. Je comprends qu’au final il n’y ait rien de plus normal de la poser quand on sait le rythme, parfois effréné, des vadrouilles que je m’octroie (rien que depuis le début de cette année, Venise, Rome, Florence et Amsterdam… et cela dure comme ça depuis plus de dix ans)… elle me heurte.
Alors je tâche d’y répondre : et la première chose qui me vient à l’esprit (avant un second billet) ? Le décentrage.
Voyager est une sorte de lâcher-prise nécessité par l’ailleurs : cela permet de s’obliger à l’inconnu, d’être le plus résilient possible face à la surprise, d’accepter de ne pas savoir et de ne pas comprendre. Je me décale alors par rapport à mes habitudes et mon univers quotidien, j’accepte tout comme allant de soi, manger d’énormes soupes de raviolis à 7h du matin ou passer 36 heures d’affilée dans un train, utiliser des toilettes répugnantes ou quelques gouttes coulant d’un tuyau pour me laver. Accepter de ne pas comprendre, et même être excitée par cette ignorance.
Parce que je pourrais décider, après ce choc global, au gré du moment et de l’humeur, de ne pas chercher plus loin ou de m’approprier progressivement ce nouveau monde.
Choisir un plat…
Menu shanghaïen très gourmand.
… et oser.
Criquets à la mode de Vientiane, Laos. Et non, ça n’est pas que pour les touristes.
Choisir un train…
Tables des trains en Thaïlande depuis Bangkok.
… et oser.
Un wagon 3AC dans un train de nuit entre nulle part et autre part en Inde.
Ne pas se tromper de station de métro…
Les lignes de métro de Tokyo sont plutôt simples à retenir. Cela prend juste beaucoup de temps…
… et oser.
Un cyclo-rickshaw à Malda au Bengale occidental.
Les motifs décoratifs changent du Kerala au Bhoutan,
des multiples partis communistes, maxistes-léninistes ou maoïstes de l’Inde
à la philosophie bouddhiste du Wise Madman, des « oeufs au thé » chinois à l’Achoura à Bombay.
Et aux salles de bain des hôtels quand on est au fin fond de l’Inde…
Ha! Je me souviens du menu tout rose! Et avoir pointé du doigt au hasard ce que je voulais.
Le plan de metro de Tokyo me fait mourir de rire! Un peu moins que les toilettes indiennes, mais ça, c'est parce que c'est vécu (et encore, celles que tu nous montres sont vraiment de grand luxe!)
En tout cas, en disant "cela permet de s’obliger à l’inconnu, d’être le plus résilient possible face à la surprise, d’accepter de ne pas savoir et de ne pas comprendre", tu résumes parfaitement pourquoi moi aussi, j'ai besoin de voyager et découvrir de plus en plus de choses. Etre déstabilisée par rapport à son quotidien, mais de manière positive (ou pas, ça dépend des fois), rester humble devant l'inconnu pour mieux l'appréhender et l'adopter et le rapporter avec soi.
Bon, c'est pas tout ça, mais j'ai tajine de dromadaire la semaine prochaine moi!
Mais donc qu'est ce que ce... non rien. Enfin si, c'est expressif ta photo du Bhoutan.