Etrangement, les îles ne m’attirent pas.
Il m’est arrivé dans mes vadrouilles de visiter des îles, d’y faire un crochet quand le besoin de farniente se faisait sentir et c’est comme cela que j’ai enfoui mes pieds dans le sable de quelques Ko thaïlandaises, des Perenthians malaisiennes ou des atolls du Bélize. Mais jamais une île n’a été un but en soi pour moi car, sans aucun doute, leur finitude m’inquiète… le contournement et le retour angoissant au point de départ, l’impossibilité de dépassement… Et j’y vois malgré moi l’ennui de la plage et le brûlant du soleil, l’obligation de « s’amuser » et du sempiternel ti punch.
L’ïle m’indispose, parce qu’encerclée dans son horizon, et bien trop carte-postale dans l’imaginaire.
Elle représente bizarrement pour moi l’enfermement double, celui du corps et de l’esprit.
Alors, quoique j’apprécie réellement le sable et la mer, les horizons marins et les embruns, quand j’ai eu d’autres occasions d’arriver dans une île c’est vers les reliefs que je me suis dirigée, l’intérieur des terres plutôt que leurs rivages.
Cuba était hors compétition, même plus une île tant du fait de sa superficie que de ses richesses. Mais l’Île Maurice remplissait tous les critères : paradis tropical, j’aurais du m’y ennuyer et pourtant j’y ai découvert à quel point l’hinterland a bien plus d’intérêt pour moi que la côte. Parcourant mes photos aujourd’hui, je retrouve bien peu de plages (qui y sont peu ou prou ce que l’on attend d’elles partout dans le monde : sable fin et blanc, eau turquoise peu profonde et (trop) chaude, et… voilà) mais plutôt collines et mornes, l’incroyable créolité et surtout un bol d’air pur et calme pour ceux qui, comme moi à ce moment-là, arrivent d’Inde…
J’ai le souvenir d’un intérieur et d’intérieurs.
Des sommets et des cascades, un plateau et des forêts, des champs à perte de vue et des petites routes sinueuses entre des murets, des bosquets et des arbres à pain masquant des villas coloniales, des villages hindous et des villes à-touristes, et une capitale étrange. Port-Louis m’a rappelé Belize City, une sorte de Tortuga de l’océan Indien tout droit sortie d’un film de pirates. Interlope, dangereuse dit-on, où l’on se croise mais ne se mêle pas. Les bâtiments flambants de la marina, et les rues sombres aux murs aveugles et aux battants d’échoppes fermés de quartiers indiens, chinois… Une ville trop rapidement close le soir, exempte de touristes, et des poubelles éventrées.
Pas ce que l’on attend d’une île tropicale mais bien plus une réalité que je recherche sous le vernis.
J’ai pénétré aussi les maisons coloniales aux longues varangues, le bois blanchi qui inspire la sérénité et les jardins manucurés.
On y rêve rapidement d’un livre et d’un fauteuil, d’une plume et de papier. On aspire à une après-midi brûlante qui nous pousse vers le lit d’une chambre aux volets clos, on attend l’accalmie pesante qui précède le déluge de mousson, ou le fracas d’un cyclone. Dans ces maisons d’un autre temps, le songe s’invite. Meubles anciens et lits chinois, coffres indiens et vasques de porcelaine française.
Le mélange est de mise, et la saudade s’immisce dans le thé glacé que tu sirotes lentement…
Il s’agit ici de la galerie d’une photographe, sise dans un ancien moulin de la côte nord de Maurice.
Maurice est bien plus faite de ces paysages-là que des longues journées de plage.
Elle m’a sans doute réconciliée avec les îles, me prenant par la main pour m’indiquer les sentes que j’avais dédaignées jusque-là, par prétention et méconnaissance. La vie insulaire est certes restreinte mais un monde entier s’y révèle quand on prend le temps de quitter ses rivages.
On y pense, on y rêve, on y construit, on y avance, bien loin des serviettes étendu es sur le sable fin.
J’ai au final une image étrange de l’Île Maurice.
Je n’y vois de plages que de l’avion. La découpe des lagons turquoises et des îlots tout proches, la frange nacrée des plages qui sertit la côte, je ne m’en souviens que vues du ciel et c’était magnifique. Pour le reste, c’est une île faites de reliefs escarpés et d’écrivains, de saveurs métissées dans de petites cantines et de musiques-mosaïques sur les radios locales. Les visages chinois, indiens, africains s’y affichent en publicité ou dans les bus, et la jeune femme au blond crépu chante un créole de français, d’anglais, de hindi et de bien d’autres langues encore.
Est-ce la richesse mauricienne ou mon regard s’est-il ouvert ? Est-ce que toute île est un petit Cuba ignoré ? Loin du fracas du tourisme j’avais effectivement oublié que l’on trouve parfois une vie préservée, dans des maisons anciennes au détour de chemins et au-delà des champs de cannes à sucre.
La concentration littorale des activités touristique n’est finalement pas un mal…
Ah quand même… un peu de carte postale !
Dis c'est quand qu'on va à l'ile Maurice? 😉
(Bon sang après avoir lu ton billet j'en rêve)
@Shaya : prends tes affaires, hop hop hop, on y va maintenaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaant !!! 😉
Tu as réussi à me faire rêver car moi aussi je ne voyais que la carte postale et ça ne me disait rien !
@ Marmouzets : alors mon but est atteint, c'était l'essentiel, faire rêver avec l'arrière de la carte postale !!! 🙂 Et si ça peut permettre de se reposer un peu l'esprit (je crois avoir vu que c'était un peu dur ces derniers jours), c'est une très bonne chose 🙂