L’Inde a toujours deux facettes. Pas plus.
De ce pays on peut en effet dire tout et son contraire sans jamais avoir tort. Y coexistent à chaque minute de ta vie ici les contraires les plus âpres, les contrastes les plus criants, les plus injustes. Cette Inde moderne-riche-guindée ou underground-et-quand-même-très-conformiste, que l’on vante et vend à l’envi pour faire croire que le pays est cet Eldorado tant souhaité, pour se faire croire aussi quand on y vit qu’il y a quand même quelque chose de « sympa » à en retirer. Et cette Inde plus que miséreuse, crasse, sordide, dont on se complaît à compter et dépeindre les intouchables écrasés pour se dire que quand même, on vit dans un pays « pas facile » mais bien utile pour faire pleurer dans les chaumières…
Toujours est-il que l’Inde est chaque jour à ton visage une explosion oxymorique. Qui génère tout à la fois haine, pitié, amour, mépris, compassion. Et ton corps et ton coeur, pleins de ressentiment et de hauts-le-coeur…
Mais il faut bien que la petite élite manucurée trouve le compte de ses roupies : que l’anniversaire de Beta (le Fils, souvent abêti par les gâgâtements autour de lui) soit le plus beau, le plus clinquant, le plus bruyant, le plus magnifique de tous, que la petite party de Noël soit la plus riche, mémorable, chatoyante, bruyante de toutes celles données cette année-là. Le Noël parfait est américain bien sûr, rappel des années vécues à l’étranger, rappel de la Réussite, the Indoamerican Dream, avec une profusion de symboles et de clichés incongrus dans la moiteur tropicale.
Alors la boutique de bouche huppée se campe en véritable maison de pain d’épices : le conte allemand passé par la case (de l’Oncle Tom ? Ah non…) de l’Oncle Sam pour complaire aux yeux exigeants-mais-pas-connaisseurs-pour-autant de la petite et riche famille indienne parfaite (deux parents, deux fils, étrange comme toutes ces familles n’ont que des fils…) bien décidée de faire de ce Noël le plus beaux des souvenirs.
Passer près de la vitrine, les mets trop sucrés, trop gras, manifestant la Réussite, et la caresser des doigts. Car je suis tactile vois-tu et quand le décor me paraît trop réaliste… il en devient réel. Marshmallows, sablés, gâteaux secs, tels des boutonnières cousues à même le mur de faux massepain, sont collés au mur.
De vrais petits gâteaux.
Oh oui, l’enfant piaillant comme sa mère et méprisant comme son père aura droit à son plus beau Noël. Mais déjà l’enfant est borgne, presque aveugle : les oeillères poussent vite en Inde, très vite. De l’autre côté de la vitrine, il y a des rues noires. Où à chaque coin, sous chaque banian, une famille cache le brasero qui cuit la maigre ration du soir. Il est interdit d’avoir un brasero sur les trottoirs de Bombay, c’est dangereux paraît-il, alors les policiers maraudent et confisquent. Ils n’utilisent pas de brasero les policiers, ils sont plus intelligents : ils font un simple feu de branchages…
Le gamin boudiné joue avec les gâteaux secs, les gâteaux secs qui décorent sa vie.
L’Inde imprime au coeur de ces élans amers.
Où l’on aimerait que la Sorcière jaillisse enfin de la maison de pain d’épices, agrippe l’enfant dodu pour l’engraisser. Encore. Juste un peu…
:-}
Et dans nos sociétés occidentales, j'ai l'impression que la tendance s'inverse : plus tu es riche et/ou éduqué, mieux tu manges et plus ton corps reflète la qualité de ton régime.
Décidément, le too-much ne fait jamais peur en Inde, si ?
Encore des histoires de riches, s' il te plaît .
C' est juste succulent !
J'ai vraiment apprécié la lecture de vos messages. Ils sont tous bien écrit et instructif.
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: y-a-t-il des avatars dans le gouvernement actuel ?@ Zoë : être cloué sur un support est signe d’une durée de vie éternelle.@ claire : je transmets à Benoît.@ perlimpinpin : de la poudreuse !@ Michel Petit : le sapin « se fait enguirlander », belle formule !